Par Dick Duerksen | Adventist World, juin 2023
On ne peut pas s’occuper de tous les enfants ! »
« Tu as raison. Mais on peut tout de même en prendre quelques-uns. »
Le docteur Saleem Farag, sa femme Grace et leurs trois filles ont passé trois ans et demi en tant que missionnaires dans les hautes terres de la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Ensuite, pendant près de 20 ans, Saleem a dirigé le Département de la santé de la Californie, aux États-Unis.
Un jour, le téléphone sonne.
« Dr Farag, la Conférence générale des adventistes du septième jour aimerait que vous vous installiez au Zimbabwe et que vous occupiez le poste de directeur du Ministère de la santé pour la Division transafricaine. Comme vous le savez, une nouvelle maladie sévit sur le continent. Nous espérons que votre expertise créative contribuera à la ralentir. »
Il semble qu’il y ait un débat au sujet de cette nouvelle maladie – le VIH/sida. Personne ne s’entend sur sa définition, sur la façon dont elle se transmet, et la façon de la traiter. Mis au défi d’affronter directement l’épidémie, le Dr Farag accepte cette nouvelle mission et déménage à Harare, capitale du Zimbabwe. Pour lui, le sida est une maladie sexuellement transmissible devant être combattue par le mode de vie, et pas seulement par des préservatifs et des médicaments.
« Le comportement, pas les préservatifs. »
Dès lors, on fait paraître différents slogans sur les panneaux d’affichage dans toute l’Afrique ; on en fait des posters que l’on affiche dans les épiceries. On les prêche depuis les chaires de nombreuses confessions ; et dans les salles de classe, des profs de tous les niveaux les enseigne.
Ayant constaté l’efficacité de l’approche du Dr Farag, le gouvernement du Zimbabwe lui demande d’accepter le poste de directeur interconfessionnel de la lutte contre le sida au Zimbabwe. Ce rôle inclut de représenter le pays lors des conférences des Nations Unies sur le sida.
« Il était occupé, bien trop occupé, raconte Grace. Mais que voulez-vous, il aimait faire des choses impossibles ! »
Or, parmi les choses impossibles, il y a les orphelins du sida.
Il y a des enfants partout ! Ils sont tout seuls, essayant se débrouiller sans parents. Le cœur de Grace fond pour chacun d’eux. Mais Saleem et elle ont maintenant l’âge de la retraite, ce qui veut dire qu’ils vont rentrer aux États-Unis. Cependant, ils sentent que Dieu les appelle à servir dans un autre ministère. Répondant à cet appel, ils décident d’ouvrir un orphelinat au Zimbabwe.
« Il faut construire un foyer pour ces enfants-là. Ça nous prend environ 10 hectares de terrain à proximité d’une école adventiste », décide Saleem.
En quête d’un tel terrain, Grace et lui sillonnent le Zimbabwe mais rentrent chez eux bredouilles. Un dimanche, Saleem décide de voir ce qu’il pourrait trouver autour de Harare, la capitale. Il passe toute la journée au volant de sa voiture, passant le secteur au peigne fin. Il s’entretient avec des gens et leur demande conseil. Au coucher du soleil, il décide d’abandonner et de rentrer chez lui. Sur le chemin du retour, il remarque soudain un terrain vague sur la route d’Amalinda. Il ralentit, et aperçoit alors un gardien.
Je me demande ce qu’il garde, se dit Saleem. Il n’y a rien sur ce terrain.
« Bonjour Monsieur ! Dites-moi, qu’est-ce que vous gardez sur ce terrain ? » lui demande-t-il.
« Ce terrain appartient aux Crest Breeders, répond-il. Ce sont des éleveurs de poulets. Moi, je suis engagé pour garder leurs terres. »
« Il y a un grand terrain ici, poursuit Saleem. Pensez-vous que les propriétaires seraient prêts à en céder une partie pour un orphelinat ? »
Le gardien réfléchit un moment, puis dit : « Si vous demandez à M. James, je pense qu’il serait prêt à travailler là-dessus avec vous. Tenez, c’est son numéro de téléphone. N’oubliez pas de téléphoner avant 7 h 30. Après ça, M. James est très occupé. »
Saleem rentre chez lui le cœur rempli d’espoir. « Dieu nous a guidés et protégés dans tous les projets que nous avons menés avec lui. S’il veut que cet orphelinat voie le jour, tout se passera bien. »
Saleem téléphone à M. James dès 7 h 30. « M. James, j’aimerais que nous nous fixions un rendez-vous pour discuter d’un sujet très important. »
« Quel sujet ? Dites-le-moi au téléphone. »
Saleem fait monter une prière silencieuse au Seigneur, et présente ensuite son projet à M. James.
« Vous possédez un terrain près d’une école. J’aimerais l’avoir pour y établir un orphelinat. »
Pendant un bref moment, M. James reste muet. Puis, il répond à Saleem.
« Écoutez, c’est vraiment pas un problème. Pourriez-vous me rencontrer sur le site demain à 7 h 30 ? Quelle superficie vous faut-il ? »
« Dix hectares suffiraient. »
« Je pense que ça ira. »
Le lendemain matin, les deux hommes parcourent le terrain ensemble et, avant la fin de la soirée, Saleem reçoit une lettre signée lui accordant 10 hectares pour le Foyer pour enfants Newstart. Il n’y a d’ailleurs pas de gardien sur ce terrain-là.
Des amis de l’Allemagne, de l’Amérique et de l’Afrique contribuent au financement du bâtiment. Par contre, il n’y a pas encore de bureaux, de lits, de couvertures, de vaisselle, de bouilloires, de couverts et de tas d’autres choses essentielles.
Les Farag invoquent alors Dieu de faire, une fois de plus, l’impossible. Tout à coup, la sonnerie du téléphone retentit.
« Dr Farag, j’ai un conteneur de 12 mètres qui vous attend sur le quai. Pouvez-vous venir le chercher tout de suite ? »
Ni Saleem ni Grace ne savent pourquoi ce conteneur est là pour eux. Ils se précipitent sur le quai pour voir ce que Dieu leur a apporté. Lorsqu’ils ouvrent les portes en acier du conteneur, ils y trouvent des lits, des matelas, des draps, des serviettes, des couvertures, des bureaux, et tout ce qui figure sur leur liste d’articles indispensables. Il n’y a aucune adresse de l’expéditeur sur le conteneur. « Encore des anges ! » s’écrie Grace.
Ce que je viens de vous raconter s’est passé en 1997. Vingt-cinq ans plus tard, plus de 170 enfants ont appelé Grace et Saleem « Maman » et « Papa ». Et 70 enfants habitent aujourd’hui dans le Foyer pour enfants Newstart.
« Un jour, nous avons reçu un appel des services sociaux nous demandant de prendre en charge neuf orphelins, se souvient Grace. Nous savions que nous ne pourrions pas les prendre tous en charge, mais nous avons convenu que nous pourrions peut-être en prendre trois. Nous sommes allés à l’hôpital, nous en avons choisi trois, puis j’ai remarqué un autre petit garçon dans un coin. »
Ce garçon, âgé d’un an et demi, est couché sur un lit en fer avec une couverture. Ses jambes et ses bras ne sont pas normaux. Le pauvre petit est complètement déprimé. Grace le prend dans ses bras pour le serrer contre elle. Il s’accroche à elle si fort qu’elle n’arrive pas à le faire lâcher prise.
« Vous ne voudrez pas de lui, dit alors un médecin. Il est malade et ne pourra jamais marcher. Il n’est pas intelligent et ne pourra jamais rien faire. Jamais. Remettez-le dans son lit. »
Grace l’appelle « Elisha » et le ramène chez eux. Saleem et Grace entourent d’amour ce petit enfant. Chaque matin, Saleem s’occupe des besoins d’Elisha. Il lui fabrique une attelle spéciale pour ses jambes, l’aide à se tenir debout et à ne pas tomber alors qu’il apprend à marcher. Le jour où Elisha réussit à marcher tout seul, Grace et Saleem l’applaudissent chaudement. Elisha a aujourd’hui 17 ans. Il est musicien et étudie la musique grâce à une bourse d’études.
J’ai encore une histoire pour vous aujourd’hui.
Un jour, on leur amène un bébé dont le cordon ombilical n’est pas encore tombé. Quelqu’un l’a trouvé dans les toilettes d’un train. Ce bébé n’a jamais ouvert les yeux. Grace le prend dans ses bras, lui donne le nom de « Shepherd », et le nourrit toutes les 15 minutes au compte-gouttes. Pendant des jours, il n’émet pas le moindre son. Puis, une nuit, Shepherd fait un petit bruit.
« J’ai sauté du lit comme une fusée, raconte Grace, et j’ai crié : “Shepherd a fait un bruit !” »
Shepherd a maintenant neuf ans. Il est en bonne santé, chante très bien, et est un élève brillant.
« Souvenez-vous, disent Saleem et Grace : chacun de ces enfants nous a été amené pour une raison. Le Seigneur a un plan pour chacun d’entre eux. Nous prions simplement Dieu de nous permettre de leur offrir le meilleur foyer possible, comme il nous a appelés à le faire. »
Dick Duerksen, pasteur et conteur, habite à Portland, en Oregon, aux États-Unis. Pour d’autres histoires au sujet de Newstart Children’s Home et pour en découvrir davantage sur le Ministère des orphelins, consultez le site suivant : Africaorphancare.org.